CRÉER SA MARQUE DE VÊTEMENTS :
BIEN CHOISIR SES PRESTATAIRES
Temps de lecture : 8 minutes
En tant que styliste freelance, je suis souvent contactée pour des projets loins de mes compétences, et je dois expliquer à des créateurs de marque de vêtements enthousiastes que je ne suis pas la bonne personne pour les aider. Ce n’est pas que les projets ne me plaisent pas ou que je n’ai pas le temps, mais certaines connaissances me manquent pour être pertinente et je crois qu’il est important de s’entourer de spécialistes.
C’est pourquoi j’aimerais aborder avec vous les différents intervenants dont vous pourriez avoir besoin en tant que créateur et comment sélectionner les meilleurs.
1. LE STYLISTE
Premier intervenant sur la création de votre collection, le styliste ne sait pas seulement dessiner des beaux vêtements. Il se tient au courant des tendances de mode mais aussi de consommation, de production… Il a l’habitude de travailler les produits dans une offre globale, de créer des assortiments cohérents. Il se doit aussi d’adapter ses propositions à l’ADN de la marque. Il connait les fibres, tissus, finitions, fournitures… bref, les contraintes techniques du design de vêtement.
Pour résumer, le styliste freelance s’occupe de la partie créative de votre collection. Il fournit un dessin à plat légendé, des simulations couleurs, des recommandations techniques… Il ne fait pas le patronage ou le prototype mais doit fournir un support solide pour le modéliste qui en prendra la charge.
Alors comment trouver le bon styliste pour votre marque ?
Si la double casquette styliste/graphiste textile et styliste/modéliste est très fréquente, on trouve de nombreuses spécialisations au sein de ces métiers.
La gamme
De la grande-distribution au luxe, les exigences créatives et techniques sont très éloignées. Pour le premier, il faudra travailler en optimisant les coûts de production et pour plaire au plus grand nombre. Ce qui ne sont clairement pas des contraintes de premier ordre pour le second.
Le rayon
Les stylistes se spécialisent souvent dans un secteur : homme, femme, enfant, bébé. Mais aussi dans un style : casual, city, young, mature, sportswear, workwear… Ou encore dans un produit : maille, jean, lingerie, accessoire… car chacun nécessite des savoirs techniques spécifiques.
Pour ma part, je n’accompagne pas de marques femme haut-de-gamme en stylisme. Je ne saurais pas dire ce qui est nouveau dans le domaine, ni recommander des tissus adaptés à un modèle de robe par exemple.
Même spécialisés, les freelances interviennent sur des projets variés. Pour le styliste comme pour les métiers qui suivront, prenez le temps d’analyser le portfolio et d’échanger avec le concerné pour connaître ses points forts.
Un exemple de services de styliste freelance
2. LE MODÉLISTE
À partir du dessin du styliste, le modéliste va transformer l’idée couchée à plat en produit en 3 dimensions. Il traduit le dessin technique en patron mais pas seulement ! Il va aussi formaliser le montage (comment les pièces sont assemblées entre elles), proposer une gradation (comment évoluent les dimensions du patron en fonction des tailles)…
Le modéliste met tout ça en forme dans la fiche technique pour la production ou peut développer jusqu’au prototype des vêtements. Il travaillera généralement en collaboration avec le styliste, notamment pour la mise au point : essayages, commentaires de correction pour l’atelier…
Les modélistes sont eux aussi spécialisés !
Certains ne feront par exemple que du patronage à la main, d’autres sur des logiciels spécialisés en 2D ou depuis quelques temps en 3D. Au-delà de cet aspect technique, si vous lancez une marque de robes de mariées, préférez un spécialiste du moulage (sur le mannequin) plutôt qu’un habitué du jean pour homme.
Si de nombreux fabricants proposent le modélisme avec leur propre bureau d’étude, notez d’abord que ce service vous sera facturé en plus de la production. Ensuite, le nombre de prototypes sera limité, avec souvent un premier jet dans une matière en stock. Les trajets des prototypes prendront du temps. Prenez soin de négocier les droits des patrons de vos produits : de nombreux créateurs se retrouvent sans leurs patrons après un conflit avec le fabricant.
Pour vous éviter ces déconvenues, collaborer avec un modéliste freelance proche de vous est la solution idéale. Vous pourrez échanger plus facilement et l’accompagner dans les essayages.
Vous voulez en savoir plus sur le métier de modéliste freelance ? Je vous recommande l’article de Textile Addict sur le sujet.
3. LE OU LES GRAPHISTE(S)
Quand on pense au métier de graphiste, le logo est souvent la première notion à venir à l’esprit. Mais le graphiste vous accompagnera bien plus loin ! Il donne une forme visuelle à votre marque. En définissant ses couleurs phares, les typographies qu’elle utilisera, l’agencement de tous ses éléments de communication…
Et là encore, je vais souligner la spécialisation ! Comme les professionnels précédents (et ceux qui suivront), bien souvent le graphiste est expert dans un domaine. Un spécialiste des chartes graphiques pour les banques sera-t-il aussi bon sur de la layette ?
Comme pour le styliste, feuilletez entièrement son portfolio. Les contraintes techniques du textile sont très loin de celle de l’alimentation par exemple. Votre graphiste est-il capable de créer un logo qui supportera la broderie ? Un tissage sur une étiquette ? Un jacquard sur un élastique ?…
Un graphiste peut-être pas. Mais un graphiste textile surement !
Le cœur du graphisme textile n’est clairement pas la création de logo. Mais de nombreux graphistes textiles freelances se forment et étendent leur champ de compétence, parfois après avoir rencontré de jeunes créateurs avec des logos inexploitables !
Moins connu que le graphiste, parlons justement du cœur du métier du graphiste textile.
Tout aussi capable que le styliste de créer une planche d’ambiance et une gamme couleur, le graphiste textile s’intéressera aux animations de vos vêtements qu’il développera ensuite.
Sont concernés : les imprimés placés, les all-over (motif qui se répètent), les broderies, les écussons, les jacrons, les broderies… mais aussi les fournitures ou encore les étiquettes ! Créer le motif adapté nécessite une connaissance des techniques d’impressions, des matières, des encres, des points de couture…
Si vous avez besoin d’imprimés pour vos produits, opter pour un freelance à la double casquette est une bonne idée. Mais si votre styliste ne sait pas le faire, il saura surement vous recommander un graphiste textile freelance.
4. LES FOURNISSEURS ET FABRICANTS
La première méthode pour développer vos produit est d’acheter »à façon ». Vous devrez gérer l’ensemble des éléments qui constituent votre produit : les tissus, fournitures, étiquettes…. Il vous faudra prendre en charge leur recherche, leur achat mais aussi leur expédition au façonnier.
L’achat à façon est extrêmement chronophage car vous allez multiplier les interlocuteurs à chaque étape. C’est aussi un choix qui peut cacher des coûts : prototype, mise au point, échantillon de production…
La seconde méthode est l’achat en »produit fini ». Ici, c’est l’usine qui est responsable de l’achat des matières mais elle peut aussi prendre en charge le modélisme par exemple. Vous bénéficiez de ses conseils et de son réseau.
S’il a l’avantage de simplifier les échanges et réduire le nombre d’interlocuteurs, l’achat en produit fini a lui aussi ses contraintes. D’abord, une dépendance forte à l’usine qui peut être problématique : renvoi de balle au tisseur sur une mauvaise matière par exemple. Là aussi, attention aux coûts cachés : facturation de la matière restante, du tri des défectueux…
Nous avons abordé la méthode, maintenant retour au fil rouge de cet article, la spécialisation !
Une usine textile qui fait tout ça n’existe pas ! Enfin si, j’ai bien un client qui en a rencontré une qui s’y engageait. Je vous raconte directement la fin : l’usine n’a développé aucun des produits de la marque. Rien n’était bon et dès le début : les matières, les fits, le respect du dossier technique…
Ce créateur a dû recommencer entièrement le développement de tous ses produits, perdant des mois sur le projet. Cette fois, il a travaillé avec un fabricant de vêtements techniques pour ses produits de pluie et un fabricant spécialisé en maille pour ses leggings, et ça a marché !
Cet exemple pour soulever l’importance de la spécialisation de vos fabricants : une usine développe différentes familles de produits dont les contraintes techniques sont liées aux matières utilisées. Pour fabriquer un jean par exemple, on choisira des aiguilles particulièrement résistantes et des fils épais, à l’opposé d’un tee-shirt dont la souplesse impose d’autres standards.
Multiplier les fabricants vous permettra de choisir les plus qualifiés pour vos produits mais aussi de ne pas vous retrouver sans rien en cas d’imprévu.
Plus d’infos sur le sujet
5. LES AUTRES PRESTATAIRES
LE MANNEQUIN CABINE
Pour terminer sur le développement de la collection, lors de vos essayages vous aurez besoin d’un mannequin cabine. Si on associe généralement mannequin à grand et mince, le mannequin cabine a pour spécificité d’avoir les mensurations moyennes d’une cible.
Les créateurs se choisissent souvent eux-même ou un proche pour ce poste. Si vous faites ce choix, pensez à bien le choisir en vérifiant les mensurations moyennes concernées (un article Fashion Network sur le sujet).
Petit exemple issu de mon expérience : sur une collection homme jeune lifestyle, les prototypes sont réalisés en taille M sur un mannequin d’entre 20 et 30 ans. Sur une collection homme mature casual, le prototype est en taille L et le mannequin plus agé peut même présenter la petite bedaine de l’âge.
LE PHOTOGRAPHE
Les photos de vos produits seront le premier contact entre eux et votre client. C’est pourquoi il ne faut pas négliger le choix du photographe. Eux aussi ont des domaines de prédilection : certains se spécialisent en portrait, en spectacle vivant, nature, mariage, food, accessoire…
Ce n’est pas parce qu’un photographe est excellent sur le vif qu’il sera bon pour donner des directions lors d’un shooting. Le revoilà : le portfolio ! Choisissez un photographe dont le style sera pertinent pour votre marque, dont vous aimez les cadrages, les compositions, les retouches…
Vous pouvez aussi faire appel à un styliste photo. Il pourra concevoir le shooting pour vous : composition des silhouettes, accesoirisation, casting, repérage, direction artistique…
LE DÉVELOPPEUR
Le premier canal de vente des créateurs est souvent leur site internet. S’il est tentant de prendre le moins cher ou de se lancer seul sur Wix, un spécialiste sera encore une fois le bienvenu.
Développer une boutique en ligne nécessite quelques compétences de plus que pour un site vitrine. Un spécialiste des sites de vente en ligne saura sécuriser les paiements et intégrer les obligations légales (Mentions légales, CGV, RGPD…) ou encore vous conseiller sur la rédaction de vos fiches produit.
Il existe de nombreux métiers liés à la création du site internet. Une petite liste non exhaustive pour vous aider à lire les profils lors de vos recherches :
• le web developper est en charge de la fiabilité technique du site
• l’UI designer conçoit l’interface utilisateur, c’est-à-dire les éléments visuels
• l’UX designer pense l’expérience utilisateur, comment optimiser sa navigation
• le SEO manager est responsable du positionnement de votre site dans les recherches internet
LE COMMUNITY MANAGER
Ce professionnel a la responsabilité de faire connaître votre marque. Il créé et anime sa communauté, le contenu qui lui est destiné et fait remonter les expériences positives ou négatives qu’elle rencontre.
Prenez soin de sélectionner un community manager qui maitrise les codes de votre cible et sait s’adapter à un univers de marque. Vous vendez à des particuliers ? Vous n’avez pas besoin d’un expert de LinkedIn mais plutôt d’Instagram. Veillez aussi à vérifier ses connaissances en création de contenu : ce n’est pas qu’un rédacteur, il doit aussi être capable de créer des images fortes et adaptées aux différents réseaux.
Et si vous souhaitez démarrer une campagne de publicité, même sur les réseaux sociaux, rapprochez-vous d’un expert en marketing digital.
POUR CONCLURE
Tout professionnel spécialisé a rencontré des clients aux profils similaires au votre. Il connait vos besoins, vos contraintes, les problèmes que d’autres ont traversés et a surement déjà aider à les résoudre. Peut-être a-t-il même créé des solutions clés en main dont vous pourrez bénéficier.
Ne vous précipitez pas sur la connaissance d’une ami ou le devis le plus bas. Pour chaque étape, contactez au moins 3 professionnels. Échangez avec eux ! Voyez si leur méthodologie vous convient, si leurs compétences et devis sont cohérents avec vos besoins.
Si vous avez trouvé la perle rare, mais que vous tiquez sur le devis, n’hésitez pas à en discuter. Les freelances ont l’habitude de la variété.
Votre budget est plus petit que le devis ? Les stylistes ont l’habitude de faire plusieurs propositions par produit et plusieurs corrections. Vous pouvez convenir de limiter le nombre d’options initiales, de ne recevoir que le dessin noir et blanc en premier jet… autant de leviers pour ajuster votre collaboration.
Pour aller plus loin et découvrir tous les métiers du textile, voici un lien vers l’excellent blog de Textile Addict sur le sujet.
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